L’affaire des cursus en anglais au Politecnico di Milano rouvre le débat sur la gouvernance linguistique de l’université italienne, alors que le pays semblait se résigner à un bilinguisme italien-anglais (De Mauro, 2014). Tandis qu’en France la résistance linguistique est ancrée dans une vision géopolitique mondiale, la Péninsule découvre avec une certaine stupeur la décision de sa Cour constitutionnelle affirmant la primauté de la langue italienne dans le Supérieur. On aurait cependant tort de penser que l’Italie suivrait ainsi le “modèle français” en matière d’officialité et de protection de la langue nationale. D’une part, l’italien reste catalogué dans les langues MoDiMEs: l’Italie ne peut donc compter sur un panel d’étudiants étrangers munis de compétences suffisantes pour affronter un enseignement exclusivement en italien, tandis que les critères d’évaluation internationaux exercent une forte pression pour augmenter quantitativement le recrutement étranger. D’autre part, on reconnaît aisément que l’arsenal juridique français n’empêche pas la croissance des cursus en anglais. Il faut donc trouver de part et d’autre des Alpes, des voies de pluralisme plus ouvertes que le « tout en langue nationale ». C’est dans ce cadre que nous plaiderons pour une inclusion plus déterminante des pratiques de l’intercompréhension (IC) dans la gouvernance universitaire. Cette approche est en train de s’institutionnaliser au fil des projets européens : projet MIRIADI (plateforme d’apprentissage en interaction et référentiel de compétences), projet EVALIC (protocoles d’évaluation des compétences en IC). Ces outils pourraient permettre de prendre sérieusement en considération le plurilinguisme dans la gouvernance linguistique universitaire: réception des textes et discours dans plusieurs langues, alternance codique en classe, régime multilingue pour la rédaction des travaux et éducation des personnels à l’interaction plurilingue. Il s’agit en effet moins d’imposer une langue nationale que de créer un bassin suffisamment large de récepteurs pour les pratiques plurilingues permettant à chacun de penser dans sa langue (OEP, 2016). L’université Lyon 2 semblerait s’engager sur cette voie.

L'intercompréhension levier du plurilinguisme et de l'internationalisation de l'enseignement supérieur

Garbarino, Sandra
;
Anquetil, Mathilde
2022-01-01

Abstract

L’affaire des cursus en anglais au Politecnico di Milano rouvre le débat sur la gouvernance linguistique de l’université italienne, alors que le pays semblait se résigner à un bilinguisme italien-anglais (De Mauro, 2014). Tandis qu’en France la résistance linguistique est ancrée dans une vision géopolitique mondiale, la Péninsule découvre avec une certaine stupeur la décision de sa Cour constitutionnelle affirmant la primauté de la langue italienne dans le Supérieur. On aurait cependant tort de penser que l’Italie suivrait ainsi le “modèle français” en matière d’officialité et de protection de la langue nationale. D’une part, l’italien reste catalogué dans les langues MoDiMEs: l’Italie ne peut donc compter sur un panel d’étudiants étrangers munis de compétences suffisantes pour affronter un enseignement exclusivement en italien, tandis que les critères d’évaluation internationaux exercent une forte pression pour augmenter quantitativement le recrutement étranger. D’autre part, on reconnaît aisément que l’arsenal juridique français n’empêche pas la croissance des cursus en anglais. Il faut donc trouver de part et d’autre des Alpes, des voies de pluralisme plus ouvertes que le « tout en langue nationale ». C’est dans ce cadre que nous plaiderons pour une inclusion plus déterminante des pratiques de l’intercompréhension (IC) dans la gouvernance universitaire. Cette approche est en train de s’institutionnaliser au fil des projets européens : projet MIRIADI (plateforme d’apprentissage en interaction et référentiel de compétences), projet EVALIC (protocoles d’évaluation des compétences en IC). Ces outils pourraient permettre de prendre sérieusement en considération le plurilinguisme dans la gouvernance linguistique universitaire: réception des textes et discours dans plusieurs langues, alternance codique en classe, régime multilingue pour la rédaction des travaux et éducation des personnels à l’interaction plurilingue. Il s’agit en effet moins d’imposer une langue nationale que de créer un bassin suffisamment large de récepteurs pour les pratiques plurilingues permettant à chacun de penser dans sa langue (OEP, 2016). L’université Lyon 2 semblerait s’engager sur cette voie.
2022
La gouvernance linguistique des universités et établissements d’enseignement supérieur
Ecole Polytechnique Eds
219
236
978-2-7302-1696-8
Intercomprensione, internazionalizzazione, plurilinguismo, università
Garbarino, Sandra; Anquetil, Mathilde
File in questo prodotto:
File Dimensione Formato  
Anquetil-Garbarino-GLUES (1).pdf

Accesso riservato

Tipo di file: PDF EDITORIALE
Dimensione 4.68 MB
Formato Adobe PDF
4.68 MB Adobe PDF   Visualizza/Apri   Richiedi una copia

I documenti in IRIS sono protetti da copyright e tutti i diritti sono riservati, salvo diversa indicazione.

Utilizza questo identificativo per citare o creare un link a questo documento: https://hdl.handle.net/2318/1861693
Citazioni
  • ???jsp.display-item.citation.pmc??? ND
  • Scopus ND
  • ???jsp.display-item.citation.isi??? ND
social impact