Certains auteurs contemporains ont développé au cours des dernières décennies une gamme de postures auctoriales caractérisées par le recours systématique à l’ironie. Les codes littéraires cristallisés, la figure mythique du Grand Écrivain et l’ego de l’auteur lui-même deviennent les cibles privilégiées de leurs attaques subtiles : d’une telle attitude dérive un ethos d'auteur évanescent, jovial et, de nos jours, farouchement isolé, enclin à adopter une pose de dandy contemporain. L’objectif de cet article est d’interroger un thème qui revient avec une fréquence significative dans ce corpus, l’image d’un écrivain qui s’enferme dans sa propre maison. Notre conviction est que la reprise de ce topos romantique permet aux auteurs abordés ici d'approfondir leur paratopie particulière, en justifiant à la fois leur position problématique dans la société en tant qu’écrivains et un ensemble d’œuvres littéraires caractérisées par un goût obstiné pour le second degré, la métalèpse et l’expérimentation formelle. En particulier, nous examinerons un curieux texte qui illustre magistralement cette tendance des écrivains ironiques à se dépeindre comme des individus cloîtrés : il s’agit d’un autoportrait oblique en forme de description méticuleuse d’un appartement de 50m2, Intérieur de Thomas Clerc (2013). Si, dans une époque littéraire défavorable à l’ironie, une telle propension à un détachement ludique et relativement insouciant peut susciter des méfiances et des perplexités, l’histoire nous enseigne que la posture du dandy désenchanté, de l’anachorète, bref, de l’écrivain qui rejeté la doxa de son temps, peut constituer une façon particulière de légitimer sa place dans le champ littéraire.
Paratopie de l’écrivain ironique : à propos des auteurs qui se cloîtrent
Grosso, Alessandro
2022-01-01
Abstract
Certains auteurs contemporains ont développé au cours des dernières décennies une gamme de postures auctoriales caractérisées par le recours systématique à l’ironie. Les codes littéraires cristallisés, la figure mythique du Grand Écrivain et l’ego de l’auteur lui-même deviennent les cibles privilégiées de leurs attaques subtiles : d’une telle attitude dérive un ethos d'auteur évanescent, jovial et, de nos jours, farouchement isolé, enclin à adopter une pose de dandy contemporain. L’objectif de cet article est d’interroger un thème qui revient avec une fréquence significative dans ce corpus, l’image d’un écrivain qui s’enferme dans sa propre maison. Notre conviction est que la reprise de ce topos romantique permet aux auteurs abordés ici d'approfondir leur paratopie particulière, en justifiant à la fois leur position problématique dans la société en tant qu’écrivains et un ensemble d’œuvres littéraires caractérisées par un goût obstiné pour le second degré, la métalèpse et l’expérimentation formelle. En particulier, nous examinerons un curieux texte qui illustre magistralement cette tendance des écrivains ironiques à se dépeindre comme des individus cloîtrés : il s’agit d’un autoportrait oblique en forme de description méticuleuse d’un appartement de 50m2, Intérieur de Thomas Clerc (2013). Si, dans une époque littéraire défavorable à l’ironie, une telle propension à un détachement ludique et relativement insouciant peut susciter des méfiances et des perplexités, l’histoire nous enseigne que la posture du dandy désenchanté, de l’anachorète, bref, de l’écrivain qui rejeté la doxa de son temps, peut constituer une façon particulière de légitimer sa place dans le champ littéraire.File | Dimensione | Formato | |
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